Ajout du 27/12/2016 à 20h01 : ce soir, nous apprenons que Carrie Fisher, la princesse Leia de « Star Wars », est décédée. Je lui dédie ce post sur lequel je travaille depuis plusieurs jours. Toute mes pensées les plus sincères sont à elle et cette page de l’histoire de la science fiction qui se tourne …
Aujourd’hui, les bras m’en tombent ! Ce que je croyais être un repère fondamental de notre société, une certitude gravée dans le marbre, s’est effondré par la bouche d’une caissière de supermarché ! Je vais vous narrer ma mésaventure.
Mais pour cela je dois remonter quelques semaines en arrière si non, on ne peut pas comprendre.
Tout commence donc il y a quelques semaines. Voyez-vous, j’ai une affection particulière pour Star Wars. Mais attention, je suis de la génération du premier épisode. Enfin, je veux dire du 4ieme épisode puisque la série commence par le milieu. Hé oui, je ne pense pas que Georges Lucas soit centriste mais il a fait le choix de sortir les épisodes IV, V et VI avant les épisodes I, II et III. Allez comprendre pourquoi … mystère. Pour le concept, c’est un peu comme si vous alliez d’abord en seconde, première puis terminale avant d’entrer en sixième, cinquième et quatrième … allez comprendre. Ou encore, que vous lisiez la bible en commençant par Jésus et son pouvoir de dingue qui ouvre la mer en deux avant même que Dieu n’ai crée le monde … tout ça parce que vous ne voulez pas vous taper les 212 premières pages du texte biblique qui énumèrent l’exhaustivité de la lignée généalogique du fils prodigue : « Généalogie de Jésus Christ, fils de David, fils d’Abraham. Abraham engendra Isaac; Isaac engendra Jacob; Jacob engendra Juda et ses frères; Juda engendra de Thamar Pharès et Zara … » Ca y est, je suis déjà paumé. Déjà que je suis incapable de conceptualiser le lien de parenté entre l’arrière petit cousin par alliance de la soeur bisaïeule du neveu du frère de ma mère, vous imaginez le travail.
Bon, reprenons « Pharès engendra Esrom; Esrom engendra Aram; Aram engendra Aminadab; Aminadab engendra Naasson; Naasson engendra Salmon … » ho ho ho, pas si vite ! Et Zara alors, hein ? J’ai bien lu que Juda engendra Thamar machin bidule et … Zara. Alors Zara elle engendre qui ? hein ? Pourquoi la bible ne nous dit pas ce qu’elle devient ? hein ? c’est parce que c’est une femme ? C’est ça ? Et l’égalité des sexes alors ? C’est pour qui ?
Pour une fois que j’avais la réponse et mes repères…. Bein oui … Zara c’est bien celle qui a engendré les magasins de vêtement pour femmes 🙂
Bon, bref, vous avez compris, notre George Lucas, il ne s’est pas emmerdé avec tout ça. Pof, il a commencé direct à l’épisode IV … au « mi-heu » comme dirait notre célèbre centriste qui a une mémé à Bagnères-de-Bigorre. Et c’était en 1977. On découvrait alors la princesse Leïa aux prises avec Dark Vador, tout ça parce qu’elle a chouré des plans top secret et le grand motard à la voix d’aspirateur rowenta il est trop pas content. Mais comme l’histoire commence à l’épisode IV, hé bein on ne saura jamais comment la princesse s’est alourdie sur les documents visiblement vachement importants.
Mais bon, là n’est pas l’essentiel puisque de toute façon, mon épisode préféré c’est pas celui là. En effet, vous l’avez compris, je suis un fan de Star Wars genre « canal historique ». Du coup, j’ai un net penchant pour l’épisode VI « Le retour du Jedi ». Et là, je vous vois venir avec votre blague à 2 balles : « ha oui, je connais, c’est le film hebdomadaire !« . Alors on répond « Le film hebdomadaire ?« . Et l’autre reprend « Bein oui … le retour du jeudi … c’est toutes les semaines … ha ha ha » blague à 2 balles je vous avais prévenu 🙂
Bon oublions la vanne de relou. Le retour du « Jé-daïe », c’est l’épisode ou le jeune Luke Skywalker vient apprendre la sagesse du côté éclairé de la force. Et qui c’est qui lui transmet la sagesse, hein … je vous le demande ? hein ? … hé bein c’est maître Yoda. Et là, vous avez en tête l’image de maître Yoda car tout monde connaît maître Yoda … hein ?
Bon, je vous mets une photo pour le cas où :
Heuuu cela va sans dire mais cela va mieux en le disant : « Yoda … c’est le personnage, aux oreilles de vulcain, tout vert à gauche sur la photo qui se tient sur sa canne » 😉
Et là, il est en train dire à Luke Skywalker : « Le côté obscur de la Force, redouter tu dois. » Oui … Maître Yoda a une phraséologie qui lui est propre. Par exemple, il ne dit pas « Saperlipopette, j’ai oublié de racheter du café. Je vais encore devoir faire de la chirloute avec le vieux marc d’hier » ; il dit « Chiotte ! de racheter du café j’ai oublié. Du jus de chaussette je vais encore me taper« . Bon, la traduction est approximative car personne ne peut prétendre maîtriser le « parler Yoda ».
Bon, maintenant que le décor est planté, voilà ce qui m’amène : depuis pas mal de temps, j’avais envie de trouver un maître Yoda à mettre dans mon atelier. Vous savez, le genre de figurine produit dérivé du film qui permet au producteur de s’en mettre encore plus plein les fouilles. Bref, en écrivant cela je montre que je suis parfaitement conscient du comportement consumériste de cette envie mais au moins … j’assume en connaissance de cause. En psychologie on appelle ça « un processus de réduction de la dissonance cognitive » … et paf !
Seulement voilà, le producteur du film, c’est pas la première buse venue. Voyez-vous, si vous avez fait le tour des magasins en cette période de fêtes vous avez dû remarquer que les rayons débordent de jouet. Et la thématique Star Wars est bien représentée. Sauf que dans les figurines, on trouve une foultitude de Dark Vador, au moins autant de storm trooper … et accessoirement les personnages du dernier épisode en date. Mais vous avez compris que je ne parlerai pas de ces nouveaux personnages, sans âme, sans personnalité car je suis un « fan canal historique ».
Bref, je comprends que tout le monde rêve d’un Dark Vador chez lui mais certainement pas d’un maître Yoda. Du coup, notre business man amerloque commercialise ce que les clients veulent acheter, et surtout pas ce qui pourrait leur ouvrir l’esprit. Donc on ne trouve que pléthore de Dark Vador qui représente, il faut se le rappeler … le côté obscur de la force mais aucun Yoda qui lui représente la lumière et donc l’intelligence et la sagesse.
Donc après plusieurs semaines de recherches infructueuses, je suis rentré chez moi avec un Dark Vador sous le bras. 50 cm de côté obscur de la force dans mon atelier, il va quand même falloir que je trouve un contre pouvoir me dis-je … et j’ai trouvé ! Regardez la photo : ce bras tendu en avant avec la paume de la main vers le ciel, ce geste qui permet à Dark Vador d’étrangler n’importe qui à distance. Hé bein … couick ! tout le fluide la force est neutralisé par … l’innocence du Petit Prince. Quel plaisir de mater le côté obscur de la force … ha ha !
En gros, voilà ce que ça donne :
Qu’il a l’air nouille tout d’un coup ce Dark Vador, hein ? Il a beau serrer le poing droit pour exprimer son bouillonnement interne … Le Petit Prince sur sa main gauche, qu’il porte haut sans faillir, prouve son allégeance à la paix et la sagesse du côté éclairé de la force … ha ha je te tiens Dark Vador !
Mais bon, j’avoue que je reste tout de même sur ma faim. Quand pas plus tard que la semaine dernière, dans ma grande épicerie numéro 2 dans l’ordre de mes habitudes de consommateur : un maître Yoda ! attention, pas 2, non … 1 seul. Et dans un emballage dont on sent qu’il a vécu comme s’il avait traversé l’espace sidéral à la vitesse lumière dans le millénium faucon … mal rangé dans la soute à bagage, jeté de ci de là, contre les parois, au gré des trajectoires d’évitement des tirs du TIE Fighter de Dark Vador … ouf !
Mon sang ne fait qu’un tour, je le prends … enfin presque car une autre main fait le même geste que moi ! « Touche pas au grisbi salope » (voix de Francis Blanche dans la scène cultissime de la cuisine des tontons flingueurs). C’est un grand gaillard, épais comme une armoire lorraine, qui a la même motivation que moi … il veut le maître Yoda, le seul sur le rayon. Alors c’est une question de vie ou de mort car il n’est pas question que je laisse cet énergumène s’emparer de MON maître Yoda.
Uppercut du gauche, baffe dans sa gueule (oui, j’ai eu le temps d’aller chercher un escabeau pour que ma main soit à bonne hauteur), redescendu de l’escabeau je lui percute le bide avec un direct du droit, je me retourne façon Néo dans Matrix et … au ralenti … je lui balance ma Caterpillar montante dans sa face (oui, entre temps je suis remonté sur l’escabeau, faut suivre). Ma chaussure lui déboîte la mâchoire et je perçois 3 dents, peut être même 4 car la rapidité de l’action m’empêche de bien compter, je redescends de l’escabeau et, dans un geste final, je projette la tête de maître Yoda pour lui massacrer les gonades … « ha ha … fallait pas toucher au grisbi … compris ?« . Fier d’avoir vaincu mon adversaire d’achat commercial, je laisse le gugusse allongé par terre et sans me retourner, je lui lance : « fallait pas avoir des vues sur mon Yoda … capitchi ?« .
Bon, en même temps, tout en me dirigeant vers les caisses, je me demande en moi-même si ce n’est pas le côté obscur de la force qui vient de guider mon comportement un tantinet … belliqueux … oui mais quand même, il n’y en avait qu’un seul de maître Yoda …
Arrivé aux caisses, je poireaute comme un âne en attendant mon tour dans cette file d’attente interminable … j’aime pas les files d’attente aux caisses des supermarchés. J’ai l’impression d’être un citoyen communiste aux pires heures du collectivisme imposé par le soviet suprême. Vous avez compris, en filigrane, que je ne voterai pas Mélanchon aux prochaines élections 😉
Bref, c’est mon tour, je dépose mon maître YODA sur le tapis roulant. Dans ma tête, je prépare mes arguments pour justifier cet achat aux yeux de quiconque pourrait me demander ce que je fais avec ce jouet pour gamin. « c’est pour le p’tit, c’est son anniversaire demain … non, pas crédible … c’est pour le fils du concierge, il est fan de star wars … ha oui ça se tient … je pourrais même ajouter qu’il a 11 ans, ça renforce l’argument … bon, en même temps« . Et là, je suis interrompu dans mes pensées « HAAAAaaaargggg » c’est la caissière, elle vient de crier, surprise par maître Yoda qui avance inexorablement vers elle en la regardant avec ses yeux de chevalier Jedi. »
Elle : « c’est à vous ? »
Moi : « bein oui »
Elle : « bein dites-donc … votre shrek … il m’a foutu la trouille ! »
Mon quoi ? Shrek ? Là, je suis tombé à la renverse. Assis par terre puisque je venais de tomber à la renverse (d’ailleurs, il faudra dire au directeur de ce magasin que son carrelage est vraiment pas confortable) … et sans bras car souvenez-vous, j’ai introduit cet article en écrivant que « les bras m’en tombent » … j’ai pleuré toutes les larmes de corps ! Comment ? Comment pouvait-elle prendre Maître Yoda pour … Shrek ? Confondre le plus puissant des chevaliers Jedi avec … avec … un ogre vert affublé d’un âne ! Confondre 900 ans de sagesse avec … celui qui se lave les dents avec un liquide vert, qu’il tire d’une limace ?
Je crois que c’est à ce moment précis que j’ai compris qu’il était trop tard, qu’avec un tel niveau d’inculture dans la population française, le point de non retour était atteint. Jusqu’ici j’avais gardé espoir. Je me disais que ça ne pouvait pas arriver dans mon pays, en France. Non, ce n’était pas possible. Ce phénomène a déjà fait des ravages, regardez l’Angleterre … pan le Brexit ! Regardez l’Amérique … pan un Trump ! Alors je gardais espoir, convaincu que mon pays, le pays des lumières ne pouvait pas tomber dans l’inculture, l’ignorance, perdre à ce point ses repères. Et bien je m’étais trompé ! Croyez-moi quand on prend un maître Yoda pour un Shrek, c’est que le mal est là. Comme ces jours fébriles qui devancent la survenue de la grippe, la trumpisation foudroyante nous guette.
Moi je vous le dis « tout va à vélo ». Je vous le dis « tout fout le camp ! »
Le texte de cet article en audiodescription pour les personnes … qui veulent pô lire😉